Charles BERENGUER : Apprendre à oser et trouver sa voie

Interview : Juin 2017

Charles BERENGUER a co-fondé Popmyday, une application mobile de prestations beauté à domicile, avec Morgane L’HOSTIS après leur rencontre à HEC.

Lancée à Paris fin 2014, la startup a reçu en 2015 le Prix du Meilleur Potentiel de l’incubateur HEC après avoir remporté en 2014 le premier prix du L’Oréal HackDay.

Après la rencontre de Morgane, découvrons le parcours de Charles et sa vision de l’entreprenariat .


Comment te présentes-tu sur le plan professionnel ?

Charles BERENGUER. Je dis en général que j’ai monté ma boite, ou encore que je lance une « apps » si mon interlocuteur est un « geek ». Si je m’adresse à une personne plus généraliste, je parle du lancement d’un service.

Récemment j’avais un entretien avec notre banquier. J’ai donné les chiffres clés de l’activité, j’ai cité le fait que nous soyons sortis lauréats de l’incubateur HEC, et mentionné le financement que nous avons remporté suite à un concours organisé par une fondation. Tout cela contribue à mettre en confiance des investisseurs qui sont frileux et demandent à être rassurés.

Qu’est-ce qui rassure un banquier sur une activité ?

Un business model facile à comprendre, une activité en croissance, un marché avec un fort potentiel de développement ou encore de la notoriété.

Lorsque je propose de taper « Popmyday » dans Google, un grand nombre d’articles apparaissent : Elle ,  Grazia, un replay de  Capital sur M6. Cela déclenche une crédibilité immédiate car les articles de presse spontanés sont rares.  Avoir cette visibilité sans dépenser d’argent, en soi, est une performance qui intéresse les investisseurs que nous rencontrons.

D’ailleurs, même dans le cadre privé, autant de la part d’amis ou de la famille, c’est avec cette visibilité que notre projet a été compris et pris au sérieux.

Vous travaillez à quel rythme ?

Je n’ai jamais calculé notre temps de travail mais nous sommes souvent là de 8h à 22heures du lundi au samedi inclus et parfois, en fonction des évènements, cela peut aussi être le dimanche. Depuis peu nous faisons en sorte que chacun d’entre nous puisse disposer d’un week-end de repos par mois.

Quels investissements et quels renoncements sont nécessaires au démarrage d’une activité ?

L’un des éléments les plus difficile est la frilosité des investisseurs, qui préfèrent des structures plus matures, ce qui limite la création d’entreprises aux plus riches. Si autour de soi on ne dispose pas d’une famille ou d’un entourage qui puisse apporter de la « LoveMoney » pour lancer l’activité et rémunérer les premiers frais, c’est extrêmement périlleux. Cela coûte cher de monter la structure et son cadre juridique, développer un site web, mais aussi en parallèle de financer un toit et de quoi manger, au moins quelques pâtes. Ce sont des centaines d’euros qui partent très vite. L’argent peut rapidement manquer à une personne qui n’a pas ces appuis.

Pour Popmyday nous avons eu la chance de pouvoir combiner plusieurs apports : quelques concours remportés, un investissement de nos familles respectives ainsi que d’un business angel. Bout à bout cette somme d’un peu plus de 50 000 euros a permis de mettre le projet sérieusement sur les rails, au sein d’un cadre juridique.

Notre chance, à Morgane et à moi-même, c’est d’avoir été prévenus par des entrepreneurs de startups : « Si vous ne pouvez pas survivre sans ressource pendant au moins deux ans, ce n’est pas la peine de vous lancer car c’est le temps dont vous aurez besoin pour créer quelque chose. »

Comment définis-tu une startup ?

À mon sens c’est une structure qui ne sait pas encore ce qu’elle va vendre, ni à qui.

Au départ, on ne connaît pas encore les pressions économiques ni le business plan. La rentabilité n’est pas une question qui se pose d’emblée lorsque l’on cherche à lancer un service innovant pour lequel le marché n’est pas encore identifié. Le business model est à peine connu et sera sûrement amené à changer de nombreuses fois. La projection est difficile : il n’y a pas d’études ou d’éléments rationnels auxquels se comparer. D’ailleurs, le faire pourrait être dangereux car plus on fige les choses, moins on est capable de les changer quand nécessaire. Il s’agit d’expérimenter des hypothèses et d’observer ce que cela génère. Le travail est de transformer de nombreuses questions en réponses.

Comment est venue ton envie de lancer une startup ?

Avoir fait plusieurs stages au sein de grandes entreprises m’a très clairement donné envie de fuir à tout prix ce monde.

Lors de mon premier stage, tout jeune, j’ai cherché à y découvrir le sens de l’activité, y trouver ce qui est central car je souhaitais avoir le sentiment de contribuer au projet d’entreprise. Cependant, mon constat sur les différents stages est que tu es cantonné à des tâches peu intéressantes avec des répercussions inexistantes sur l’essentiel, c’est à dire sur ce que fait la boite, sur ce qu’elle vend, sur sa vision. Comme pour beaucoup d’autres salariés, c’est à l’opposé de ce à quoi j’aspire. Donc au bout de 3 mois : je mourais d’ennui, par conséquent, je ne me suis pas posé la question d’intégrer une grande entreprise très longtemps. Je me suis plutôt demandé ce que j’allais bien pouvoir faire…

Comment t’est venue l’idée de monter ton projet avec quelqu’un d’autre ?

Je crois que ça ne m’a pas traversé l’esprit de le faire tout seul.

Au-delà de ce qui s’est fait instinctivement, il y a des études plus rationnelles qui me confortent dans cette idée. Stanford classait les taux de réussite par nombre d’associés. Le chiffre d’or est de 2 à 3 et 4-5 est similaire à une startup lancée par une seule personne. Les réussites fulgurantes ont plusieurs fondateurs : Instagram a deux fondateurs, Snapshat également par exemple.

Je cherchais avant tout à m’associer avec une personne à fort leadership et détermination. J’avais vu Morgane travailler et je connaissais ses qualités. C’est quelqu’un qui ne lâche pas les choses tant qu’elles ne sont pas terminées. Je l’ai vue préparer un voyage aux États-Unis pour les 100 étudiants de notre promotion avec des budgets énormes. Elle a contacté des CEO de grandes sociétés pour nous y faire entrer. Elle a tout organisé à la minute près. Elle m’a complètement bluffé par son énergie et je me suis dit que j’avais très envie de travailler avec elle. C’est clairement une entrepreneuse. J’avais repéré quelques personnes dans la promotion et elle en faisait partie.

Comment en es-tu arrivé à un projet de plateforme sur le secteur de la beauté ?

J’étais décidé à monter ma boîte avant la fin du Master en école de commerce. J’étais là pour ça et j’ai été opportuniste. Avec d’autres étudiants nous avons lancé un projet de Mooc beauté. Nous avons eu de très bons retours de la part d’investisseurs. Je me suis alors fait à ce thème qui s’avère finalement assez passionnant. J’ai souhaité creuser, mais mes collègues n’ont pas voulu poursuivre. Il me manquait des associés et idéalement 2 ou en tous cas au moins 1 et surtout une fille car je ne comprenais pas tout sur la beauté.

J’ai fait un pitch sur ma recherche et j’ai rencontré Morgane. Lors d’un séminaire de team building, elle m’a proposé de me rejoindre tout en me montrant qu’elle voulait travailler sur le sujet. Nous nous sommes entendus très rapidement.

Notre sujet est simple à expliquer et à comprendre. L’idée a très bien marché et a suscité de l’enthousiasme qui nous a par retour gagnés. Nous avons rejoint l’incubateur HEC de justesse en prenant la place de personnes qui s’étaient désistées au dernier moment, et 6 mois plus tard, nous sommes sortis 1ers !

Comment te sens-tu dans cette activité aujourd’hui ?

C’est très positif. L’activité est palpitante et me donne la dose d’adrénaline dont j’ai besoin.